SCULPTURES EN PIERRE
À propos des sculptures en pierre
Etrédir (2012/…)
Sculptures en pierre en espaces publics
Autour des Esquisses (1992/1998)
Pierres Percées (1991/1997)
Travail au fil (1991)
Architectures de pierre (1987/1990)
Barques de pierre (1982/1987)
Travail au fil
L’intérieur d’une pierre est inaccessible aux sens ; pour l’atteindre, il faut briser celle-ci. On se retrouve alors avec plusieurs pierres, chacune inaccessible.
Si l’on s’obstine on n’obtient rien de plus qu’un tas de poudre. On peut aussi essayer de la couper en tranches fines : autant de surfaces – l’intérieur fuit toujours.
LE MYTHE D’ANDROGYNE (I)
marbre, 50x40x30cm; 1991
Le fil utilisé dans les carrières pour extraire et découper les blocs, pourtant, semble accéder à l’intérieur de la pierre sans la briser. Grâce au mélange abrasif de sable et d’eau qu’il entraîne, il pénètre en usant lentement, comme un torrent creuse une gorge étroite au travers d’une montagne. La surface qu’il laisse derrière lui est incertaine et ridée comme de l’eau.
LE MYTHE D’ANDROGYNE (II)
marbre, 30x30x30cm; 1991
L’action du sable et de l’eau a lentement séparé la pierre de la pierre. Chacune se souvient de sa sœur, leurs surfaces sont jumelles. Bien que semblables, elles ne coïncident qu’à peu près. Un fil les a séparées, et les rides qu’il a formées font vibrer à leur contact l’air qui a remplacé la pierre qui manque.
Dans le cas de l’usure naturelle, celle des galets, des rochers arrondis par la mer, mais aussi celle des marches d’églises, la pierre qui manque s’est dissoute, le temps l’a annihilée, anéantie, mélangée à la poussière des semelles innombrables, dissoute dans chacune des gouttes innombrables. L’épaisseur de pierre qui manque, c’est celle du passé. L’autre, celle qui reste, est lourde de toutes les formes possibles, lourde de ce qui n’a pas encore été. Entre les deux qu’un fil sépare, une surface incertaine et ridée : « maintenant ».
La surface qu’a laissée le fil est ridée comme de l’eau, la pierre absente et celle qui reste s’y reflètent. Chacune y est son propre futur et le passé de l’autre.
Christophe Loyer, 1990